Publiée en janvier 1970, elle contient dans sa première version une introduction de Michael Aquino (Temple de Set) qui restera jusqu’à l’édition Avon Books de 1976, après elle sera remplacée, suite au départ d’Aquino de l’Eglise de Satan, par une introduction de Burton H. Wolfe, biographe de LaVey.
Elle est voulue comme une parodie de la Bible et en même temps le livre de base du satanisme, le mot bible ayant un impact philologique fort. LaVey est un homme érudit mais autodidacte (il ne possède pas de diplômes), qui désire faire une synthèse de la philosophie satanique dans un livre attractif. Il sait que la forme compte autant que le fond. Les neufs déclarations sataniques ouvrent l’œuvre sur quatre livres : Satan, Lucifer, Belial et Leviathan, symbolisés par les quatre éléments.
Les deux derniers livres sont consacrés à la magie satanique et à ses rituels. Magie ? Oui, car selon LaVey, l’homme a naturellement besoin d’illusions, c’est une réalité psychique fondamentale - mais dans le satanisme, il est conscient de ce qui le conditionne. Les rituels se constituent en psychodrames entourés de « sacré » et visant à obtenir une catharsis, célébrer une fête ou marquer une transgression (rite initiatique). Le choix de LaVey d’utiliser un langage occulte imaginaire pour les rituels, a pour but de restituer le sentiment du mysterium tremendum#.
LaVey a une idée précise, née de son observation des comportements humains, de la philosophie de vie qu’il veut édicter. Il récupère notamment dans un livre oublié
Might is Right de Ragnar Redbeard des éléments pour
Le Livre de Satan. La pensée darwiniste et anti-religieuse de Redbeard convient parfaitement au point de vue satanique; cependant LaVey en expurge toutes les notions raciales propre à Redbeard et à son époque. Les essais des Livres de Lucifer et de Bélial constituent avec les neuf déclarations sataniques le premier corpus de l’Eglise de Satan distribué sous la forme d’une monographie entre 1968-1969. Ces neufs déclarations sataniques formant la base éthique de la philosophie satanique, sont inspirées par divers penseurs, entre autre par la philosophie objectiviste d’Ayn Rand notamment son roman
Atlas Shrugged, mais aussi par Sigmund Freud#.
La Bible Satanique a les défauts inhérents à son époque et à son auteur. Émergeant en pleine contre-culture californienne, ce premier essai de philosophie satanique est un reader’s digest surfant par certains côté un peu trop sur une fantaisie occulte empruntée à Aleister Crowley et à Jack Parsons, malgré la volonté affichée par LaVey de s’en détacher (cf. préface). Néanmoins, elle forme une base de réflexion à la philosophie satanique qui sera par la suite développée par Michael Aquino dans
The Ruby tablet of Set#. Il est regrettable par ailleurs qu’une bibliographie des auteurs influençant la pensée satanique se trouvant dans la première édition, ait été retirée par la suite.
L’édition française sortie en 2006, reprend la dernière édition d’Avon Books. Elle est préfacée par Peter H. Gilmore le haut responsable de l’Eglise de Satan#qui poursuit sa très commerciale apologétique de LaVey, réduisant souvent les propos de LaVey à une simple idéologie sociale-darwiniste, ne sachant pas distinguer les opinions de l’homme et la philosophie satanique dont LaVey a posé les fondations.
Ravensorg.
# Littéralement « du mystère qui fait frissonner », expression de Rudolf Otto pour définir le sentiment religieux.
# La quatrième déclaration « Satan représente la bonté pour ceux qui le servent, au lieu de l'amour gaspillé pour les ingrats. » développée dans le chapitre Amour et Haine, reprend le thème du cinquième chapitre de Sigmund Freud dans
Le malaise dans la culture.
# Publication interne du Temple de Set de plus de 1300 pages.
# L’Eglise de Satan a connu deux phases historiques, une première entre 1966-1975 puis une seconde au début des années 90 après une longue période de dormance suite au départ de Michael Aquino et d’une trentaine de responsables en 1975 qui reprochait à LaVey une orientation commerciale. Lire à ce sujet
The Church of Satan par Michael Aquino, où bien le chapitre sur le satanisme contemporain dans
Enquête sur le satanisme par le sociologue italien Massimo Introvigne.